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24Fév/15

Les bornes légales de « Kindle unlimited » en France

En début d’année, la firme américaine Amazon a envoyé ce message : « En tant qu’éditeur utilisant Kindle Direct Publishing, sachez que la législation fiscale de l’Union européenne (UE) concernant la taxation des produits numériques (dont les eBooks) a changé. Auparavant, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) était appliquée en fonction du pays du vendeur ; désormais, elle sera appliquée en fonction du pays de l’acheteur. Par conséquent, à partir du 1er janvier 2015, vous pourrez inclure la TVA dans le prix que vous suggérez pour la vente aux clients sur tous les sites de l’UE : Amazon.co.uk, Amazon.de, Amazon.fr, Amazon.es, Amazon.it et Amazon.nl. »

Cette décision européenne met un terme en France à la disparité qu’il y avait entre les distributeurs nationaux avec une TVA à 5,5% et la firme américaine installée au Luxembourg avec une TVA de 3%. Assujettir Amazon à la TVA du pays où le bien est consommé au lieu de la TVA où l’entreprise est installée semble un petit pas non négligeable. Cependant, chaque année, un nouvel épisode se joue dans la réglementation des offres d’Amazon en France que ce soit sur le plan fiscal ou sur la compatibilité des offres du géant américain avec les spécificités de la loi française relative au livre.

Amazon envoie ses commandes dans le monde entier

On se souvient qu’en 2014, le point en cause dans la vente en ligne des livres par Amazon était le cumul de la réduction de 5% sur le tarif fixé par l’éditeur et de la gratuité des frais de port. La loi du 8 juillet 2014 encadrant les conditions de la vente à distance des livres dite loi anti-Amazon a mis fin à ce cumul dans l’optique de protéger les librairies physiques en France. C’est également dans le souci de protéger les acteurs du livre, notamment les éditeurs et les auteurs que la toute nouvelle offre d’Amazon est remise en question par Fleur Pellerin. En fait, « Kindle unlimited » est la nouvelle formule proposée par Amazon en France. Elle propose l’accès illimité à plusieurs milliers de livres pour un abonnement de 9,99 € par mois. Cette offre n’est pas sans rappeler celle de Netflix et des différents distributeurs de VOD, la pratique est aussi courante en musique. Mais il semblerait que dans le domaine du livre, une telle offre se heurterait à la loi sur le prix unique du livre dans la mesure où c’est l’éditeur qui fixe ce prix et non le distributeur.

Saisie de la question, la médiatrice du livre, Laurence Engel évoque trois options considérées comme légales( selon le Figaro ) : une offre d’abonnement lancée par un seul éditeur (pour la littérature de genre), un système de crédits à dépenser, un système de «bouquets » (similaires aux bouquets ADSL). Quelque soit son option, la firme américaine a trois mois pour se mettre en conformité avec la loi française.

On oublie souvent de mettre en relief que le numérique a changé bien des choses dans la consommation et plus particulièrement dans la consommation de l’art. Prendre en compte ce fait et réfléchir, prévoir, s’organiser pour protéger les métiers affectés par ces changements désormais inévitables serait bénéfique à long terme. Les différentes lois relatives au livre ont été mûrement construites et restent pertinentes dans la conception du livre comme objet physique. Mais n’est-ce pas le moment de repenser profondément une industrie du livre devenue internationale qui peut proposer dorénavant un produit dématérialisé ? Autrement, les lois comme la loi anti-Amazon ne seraient que des fuites en avant.

Elie