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26Fév/17

Un aperçu des nouveaux mondes

Dans un article paru dans la revue Nature, le 2 mai 2016, l’équipe belge de Michaël Gillon de l’Université de Liège fait part de la découverte de 3 planètes autour d’une même étoile. Cette étoile ‘naine’, baptisée depuis Trappist-1, est à quelques 39 années-lumières de chez nous. Découvrir des planètes au delà de notre système solaire n’est plus un exploit inédit ; c’est d’ailleurs l’une des grandes quêtes des astronomes depuis une vingtaine d’années.

L’instrument TRAPPIST*, installée à l’Observatoire européen austral (ESO) au Chili

Pour l’anecdote, l’acronyme pour dénommer le télescope a été inspiré par la bière belge des moines trappistes. L’équipe belge baptisera certainement les planètes découvertes dans le même thème. Ce n’est pas Lucy qui contredirait l’originalité des noms donnés par les chercheurs à leurs découvertes.

La particularité du nouveau système découvert est que l’étoile est assez petite ; les planètes en sont très proches. Ce système est encore plus petit que l’orbite de Mercure. Du fait de ces orbites rapprochées, les périodes de rotation sont assez courtes. Le transit de ces planètes devant leur étoile est donc très fréquent. Ce qui a facilité sa découverte par l’équipe belge, c’est la conjugaison de la faible luminosité de l’étoile, de la fréquence des transits et aussi le fait que la Terre est juste placée dans le plan de l’elliptique du système de Trappist-1. Trois planètes rocheuses avaient, pensait-on, été repérées.

L’importance de l’observation a suscité l’intérêt d’autres équipes d’astronomes. La NASA mobilisa son télescope spatial Spitzer** pendant 22 jours – un autre record de cette découverte – et les astronomes identifièrent au total 7 planètes rocheuses de taille comparable à celle de la Terre, dont 3 susceptibles d’abriter de l’eau à l’état liquide. Cela justifia une nouvelle parution dans le magazine Nature, le 23 février 2017.

Nikole Lewis, astronome au Space Telescope Science Institute de Baltimore, annonçant la découverte des 7 planètes au QG de la NASA à Washington

Techniques de détection des systèmes planétaires :

  • Méthode dite du transit: observation de la luminosité d’une étoile pour détecter une baisse de luminosité au passage d’un corps passant devant son disque lumineux (TRAPPIST : le télescope terrestre a pu déterminer les fréquences des orbites, ainsi que la taille des planètes).
  • Méthode directe: observation directe de la lumière d’une exoplanète (Spitzer : le télescope orbital peut déterminer la température, les vents et la composition des planètes).

L’importance n’est pas la possibilité de coloniser ces planètes. Pourtant, elles ont une surface solide, une taille comparable à celle de la Terre, donc une gravité comparable. Certaines sont à la bonne distance de leur étoile ce qui leur permettrait d’avoir la juste température pour abriter de l’eau à l’état liquide. Cependant, ces planètes présentent toujours la même face à leur étoile, comme la Lune à la Terre. Ainsi les effets de marée dûs au faible rayon de leur orbite ont synchronisé leur rotation autour d’elles-même avec leur rotation autour de l’étoile. En conséquence il y aurait une absence d’alternance jour/nuit, d’où une météo difficile à gérer. De toute façon, les observations n’ont pas encore permis de déterminer les compositions exactes de leurs atmosphères. De plus, le voyage pour s’y rendre devrait prendre plusieurs siècles et plusieurs générations de spationautes. Nous n’y sommes pas encore prêts, loin de là.

Le système planétaire autour de Trappist-1. Les tailles des objets sont à l’échelle, mais les distances sont réduites d’un facteur 10. La couleur de l’étoile est réaliste. La zone bleutée indique la région où la présence d’eau liquide est possible en surface des planètes. La zone grisée indique la gamme possible de distances orbitales pour la planète. ©Franck Selsis, Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux (CNRS/Université de Bordeaux).

L’intérêt de cette découverte est de pouvoir observer 7 planètes d’un coup, de tenter d’y déceler des traces d’activité biologique. Toute la quête des exoplanètes*** réside dans un questionnement : sommes-nous seuls ? Si oui, pourquoi ? Et sinon, dans quelle proportion, la vie est-elle présente et sous quelle forme ? Ce système est une pièce importante du puzzle pour parfaire le modèle statistique nous permettant d’imaginer l’univers.

La cosmologie actuelle retient le postulat que l’univers est uniforme dans sa globalité, homogène et isotrope, présentant à différentes échelles à peu près les mêmes structures. Toutes les observations continuent de l’affirmer : L’univers présente des galaxies organisées en amas, réparties suivant des filaments. Les galaxies, bien que de formes variées sont constituées de trous noirs, de systèmes stellaires et de nuages de gaz. Dans toutes ces similitudes, trouver de la vie dans un autre système stellaire confirmerait cette homogénéité de l’univers.

En observant qu’une seule variante de la vie, cette vie terrestre à laquelle nous appartenons, nous avons une vision biaisée de ce qu’est la vie. On ne se réfère qu’à la vie carbonée dans un milieu constitué d’eau, la seule qu’on connaisse. C’est d’ailleurs le seul critère qui est utilisé actuellement pour déterminer la zone ‘habitable’ des orbites des planètes. Se pourrait-il que la vie ait pris d’autres formes ? Quelle chimie autre que celle du carbone permettrait la vie ? Des espèces conscientes existeraient-elles ailleurs ? Pourrons-nous interagir avec elles un jour ?

Laura

*TRAnsiting Planets and PlanestIsimals Small Telescope: un télescope installé au Chili pour observer la ciel du coté austral de la terre.
**ou SIRTF, Space Infrared Telescope Facility: un télescope placé en orbite en 2003 autour du soleil, assez loin pour ne pas être perturbé.
***exoplanète: une planète orbitant autour d’une autre étoile que le soleil.

Deux planètes passant devant Trappist-1 – Vue d’artiste – NASA/ESA/STScI/J. de Wit (MIT)